LA COMTESSE DU SOBRARBE
Aujourd'hui j'ai rencontré la Comtesse du Sobrarbe,
ma Dame, l'héritière du Pays.
En la cherchant entre livres et légendes, je la perdis,
sans m'apercevoir qu'elle était, toujours, toujours là,
sans m'apercevoir qu'elle était, toujours, toujours là.

A quoi bon alors, chaque printemps,
les amandiers ou le féroce genêt hérissé fleuriraient-ils ?
Qui alors les coqs au petit matin, salueraient-ils
sans savoir si le soleil apparaîtra,
sans savoir si le soleil apparaîtra ?

Autour d'elle maintenant, plus de cottes de maille, ni épées,
ni bannière flottant au vent.
Mais il lui reste encore un château, un petit coin,
un fief dans mon cœur, un fief dans mon cœur.

Aujourd'hui je t'ai rencontrée petite Comtesse du Sobrarbe,
jeune maîtresse de notre vieux Pays.
Comme un aigle ,tu as traversé les siècles pour venir jusqu'à moi,
et aujourd'hui je t'ai vue sortir de l'école,
et aujourd'hui je t'ai vue sortir de l'école.

En contemplant le château j'ai su qui l'avait construit.
Comment avais-je pu l'ignorer !...C'était moi !
Il me semble écouter de vieilles chansons de gestes
lorsque je t'entends rire, lorsque je t'entends rire.

Avec la plume, la charrue et l'épée,
avec la terre et le sang,pour toi, nous avons construit un pays.
Ma petite fille, mon amour te rend hommage
comme un vassal à son seigneur, comme un vassal à son seigneur.

Regarde la, c'est la Comtesse du Sobrarbe,
et pourtant elle te démande un baiser avant d'aller dormir !
Aujourd'hui elle est la maîtresse de ta maison et de ta vie,
comme demain elle le sera de ce Pays,
comme demain elle le sera de ce Pays .

Ne lui voile pas la face, ne lui fais pas croire
que dans la vie il n'y a pas d'autre rôle:
Comtesse et servante, toujours cela fut dur d'être
femme en Sobrarbe, femme en Sobrarbe.

Si l'exil est l'unique porte ouverte sur l'avenir,
ne t'étonne pas de la voir partir.
...Pays d'hommes.Tristes hommes, triste Pays !
Sans elles, comment vivre ? sans elles, comment vivre ?

…Mais aujourd'hui, douce petite Comtesse,
dans les yeux de ces fillettes, je t'ai vue sourire.
J'ai vu de grands bûchers brûler de mauvaises lois,
alors, la Nouvelle Charte, c'est à nous de l'écrire
pour qu'ici tu puisses être femme.

 

Lois, Chartes: « Fueros »
Quand le Roi ou le Seigneur accordait à ses sujets un nouveau « Fuero » pour se gouverner, on disait que le «Fuero nuevo» abolissait et laissait sans effet les «malos fueros» antérieurs. Dans la chanson, l'auteur se réfère à la discrimination à l'égard des femmes, discrimination qu'il voudrait voir disparaître en écrivant la Nouvelle Charte, afin que les fillettes d'aujour- d'hui puissent vivre dignement sur cette terre lorsqu'elles seront femmes.

 

Paroles et musique: Manuel Domínguez
Traduction: Jean-Claude Dutilh